Télétravail occasionnel

Outils de travail des télétravailleurs·ses : les règles de droit commun s’appliquent

Vu le caractère sui generis du télétravail imposé par les Arrêtés ministériels susmentionnés, les règles ordinaires de remboursement des frais des télétravailleurs·ses ne sont pas nécessairement applicables[1]. Cependant, les employeur·e·s doivent au moins appliquer le régime général de remboursement prévu dans la loi de 1978 relative aux contrats de travail. Le principe général contenu dans l’article 20 de la Loi relative aux contrats de travail de 1978 reste donc d’application : l’employeur·e à l’obligation de  mettre à la disposition des travailleurs·ses « s’il y échet et sauf stipulation contraire, l’aide, les instruments et les matières nécessaires à l’accomplissement du travail » et « d’apporter les soins d’un bon père de famille à la conservation des instruments de travail appartenant au travailleur ». Par conséquent, l’employeur·e doit fournir les outils et le matériel nécessaires à l’exécution du travail et/ou doit également compenser l’usure des outils de travail qui appartiennent au/à la travailleur·se.

Si votre règlement de travail ou une CCT d’entreprise fixent des modalités de prestation à domicile, celles-ci devraient être appliquées dans la mesure où elles conviennent à la situation de confinement. Comme le télétravail imposé par l’Arrêté ministériel susmentionné ne rentre pas dans les définitions usuelles de télétravail occasionnel ou structurel, les dispositions convenues entre les parties devront être interprétées pragmatiquement. Il n’est pas exclu qu’elles soient entièrement inapplicables, auquel cas vous vous retrouverez dans la même situation d’un·e employeur·e pour qui ses modalités n’ont pas fait l’objet d’une concertation.

À défaut d’une convention conclue entre les parties, les remboursements sont dus pour les frais réellement encourus par les travailleurs·ses dans l’exécution de leur contrat de travail depuis leur domicile.

Cela étant, l’employeur·e n’a aucune obligation de convenir au préalable sur les modalités de remboursement. L’employeur·e est en droit de demander la preuve de chaque dépense encourue par le/la travailleur·se dans l’exécution de son contrat de travail depuis son domicile et de ne rembourser que les frais qui sont effectivement imputables à l’exécution du contrat de travail.

Les forfaits proposés par l’ONSS sont des « raccourcis administratifs » simplifiant les calculs des frais supportés par le/la travailleur·se. Aucun·e employeur·e n’est obligé·e de procéder recourir à ces forfaits.

En pratique, s’il n’y a pas de régime conventionnel en vigueur, vous n’êtes pas tenu·e·s de proposer des modalités de remboursement des frais, puisque le régime de droit commun du travail s’appliquera automatiquement. Si vos travailleurs·ses demandent la fixation des modalités, celles-ci devront faire l’objet d’une négociation :

  • Soit, vous convenez d’appliquer un remboursement sur base forfaitaire, selon les catégories de l’ONSS. Pour rappel, tous les montants forfaitaires sont des maximum, et vous n’êtes pas tenu·e·s de verser les valeurs indiquées d’office. Chaque catégorie de forfait suppose certaines conditions (ex : utilisation d’un ordinateur personnel, d’un abonnement téléphonique personnel, etc.). Vous ne devez pas rembourser des frais encourus utilisant des équipements mis à disposition par l’employeur·e (par exemple, mise à disposition d’un ordinateur professionnel).
  • Soit, vous mettez en place un régime de remboursement sur base de frais réels. Vos travailleurs·ses devront apporter la preuve  de chaque dépense (ex : facture de GSM, relevé des appels sortants du GSM, comparatif de la facture d’électricité ou chauffage de l’année en cours et de l’année précédente, etc.) et la motivation de chaque demande de remboursement, à la suite de quoi vous rembourser les frais considérés légitimes.

Il est cependant conseillé d’établir un document fixant le cadre du télétravail.

[1]La communication des autorités publiques n’est d’ailleurs pas d’une grande aide, dans la mesure où le site du SPF emploi, et de l’ONSS appliquent par analogie tantôt les règles du télétravail occasionnel et tantôt celles du télétravail structurel.

 

Le remboursement de frais dans le contexte du télétravail pour force majeure

Le télétravail imposé par l’Arrêté ministériel du 18 mars 2020 (remplacé par l’Arrêté ministériel du 23 mars 2020) ne correspond pas exactement aux modalités existantes en droit commun. Dans le contexte du télétravail imposé par les autorités publiques pour les secteurs non-essentiels, il n’y a pas d’obligation de remboursement de frais.

Néanmoins, si vous souhaitez rembourser une partie des frais, l’ONSS vient d'assouplir sa réglementation et plus particulièrement la distinction qu’il y avait entre télétravail structurel et occasionnel. Dès lors, il est désormais possible d’octroyer « l’indemnité de bureau de 129,48 €/mois » pour les travailleurs·ses mis·e·s en télétravail afin de respecter les mesures édictées par l’Arrêté ministériel. Cette indemnité couvre le chauffage, l’électricité, le petit matériel de bureau, etc.

En plus de cette indemnité, l’employeur·e peut rembourser les frais suivants :

  • un forfait de maximum 20 €/mois pour l’utilisation de l’ordinateur personnel du/de la travailleur·se ;
  • un forfait de maximum 20 €/mois pour l’utilisation de la connexion internet du/de la travailleur·se.

L’ONSS accepte que ces montants soient remboursés pour autant que :

– le/la travailleur·se utilise son propre ordinateur et/ou sa propre connexion à des fins professionnelles de façon régulière et substantielle (par exemple, 1 jour/semaine, quelques heures plusieurs fois/semaine, une semaine chaque mois,…) ;

– l’employeur·e n’intervienne pas d’une autre manière dans ces frais d’ordinateur et internet (en prenant une partie du prix d’achat de l’ordinateur à sa charge, par exemple) ;

  • d’autres frais encourus par le/la travailleur·se pour lui permettre de travailler depuis son domicile (utilisation de son téléphone personnel, achat d’un scanner, ou autre équipement). Pour ces frais, le remboursement est fait sur la base des coûts réels.

Les forfaits susmentionnés sont des montants maximum en deçà desquels aucune cotisation n’est due. Il est donc possible de fixer un remboursement moins élevé. En cas de dépassement de ces montants, l’entièreté pourrait être soumise aux cotisations sociales et fiscales sauf s’il est possible de justifier de la totalité du montant. Quant à savoir si ces indemnités seront prises en charge par les pouvoirs subsidiants, il y a lieu de vérifier cela auprès de vos gestionnaires de dossiers au sein des administrations.

Les employeur·e·s qui, avant l’adoption de l’Arrêté ministériel, remboursaient des frais à leurs télétravailleurs·ses, sur la base des 10 % de la rémunération brute qui concerne les prestations à domicile, peuvent continuer à le faire, mais seulement pour le prorata prévu dans la convention de télétravail. Pour le surplus, et si vous êtes concerné·e·s par cette modalité de remboursement, nous vous référons à la fiche de l’ONSS, précitée.

Dans ses instructions, l’ONSS demande à ce que l’employeur·e puisse motiver la politique de frais qui est mise en place en produisant des documents écrits comme le règlement de travail par exemple ou une note de service.

Dans le cas présent, il est conseillé de déterminer les modalités de remboursement par écrit avec les télétravailleurs·ses (communication par voie électronique possible).

Concernant les frais de déplacement domicile-lieu de travail, la législation sociale prévoit que l’employeur·e est tenu·e d’intervenir dans les frais de transport supportés par les membres de leur personnel pour se rendre de leur domicile au lieu de travail, sous certaines conditions (distance, moyen de transport utilisé). Dès lors, un·e travailleur·se, effectuant du télétravail depuis son domicile, ne doit plus se rendre sur son lieu de travail,  il n’y a pas de remboursement à effectuer. Concrètement, l’employeur·e doit rembourser les frais de déplacement supportés par le/la travailleur·se, selon les modalités habituelles, jusqu’à l’institution du télétravail. Une fois, le/la travailleur·se en télétravail, l’employeur·e n’est plus obligé·e de rembourser les frais de déplacement domicile-lieu de travail.

Pour les transports publics, si le/la travailleur·se a un abonnement en cours (abonnement mensuel, trimestriel ou annuel), l’employeur·e doit continuer à intervenir dans les frais de remboursement dans la mesure où cet abonnement ne peut être remboursé.

Si l’association ne ferme pas, ou pas complètement, et que certains travailleurs·ses doivent adapter leurs moyens de transport, vu que les autorités découragent l’utilisation des transports en commun, vous devrez effectuer les remboursements de frais pour les déplacements domicile-lieu de travail selon les nouvelles modalités (indemnité kilométrique pour les déplacements en voiture ou à vélo).

En ce qui concerne le paiement des chèques-repas des télétravailleurs, il est à noter qu’au sein de la CP 329, aucune convention collective de travail n’instaure un système d’octroi de cet avantage. Dès lors, l’employeur·e souhaitant accorder des chèques-repas aux travailleur·ses a nécessairement conclu une CCT d’entreprise.

Si la CCT d’entreprise stipule que des chèques-repas sont octroyés pour les jours de travail effectivement prestés, il importe peu que le/la travailleur·se preste à domicile ou au siège de l’asbl. Pour la même raison, les travailleurs·ses mis·es en chômage temporaire n’ont pas droit à cet avantage car leur contrat de travail est suspendu.

 

 

Publication Fesefa – avril 2020 – Mises à jour mai 2020