DOSSIER : LES PROGRAMMES DE TRANSITION PROFESSIONNELLE : 10 ANS APRES
L'accord de coopération conclu le 1 mars 1997 entre l'Etat fédéral et les Régions a permis la création des Programmes de Transition Professionnelle, dont l'objectif était et demeure toujours de « rencontrer des besoins collectifs de société qui ne sont pas suffisamment rencontrés par le circuit de travail régulier » et d'engager pour une durée réduite (maximum 2 ans), des chômeurs peu qualifiés - en particulier ceux de moins de 25 ans -, des chômeurs de longue durée et des bénéficiaires du revenu d'intégration sociale ou d'une intervention financière du CPAS.
Dix ans après, les Missions locales souhaitent ré-affirmer l'utilité de ces programmes et leur volonté de les continuer. Leurs pratiques se sont adaptées au contexte socio-économique actuel, et plus particulièrement aux besoins - récurrents et nouveaux - des chercheurs d'emploi bruxellois peu qualifiés.
Delphine Huybrecht et Suzanne Beer
Le programme de transition professionnelle est un dispositif de création d'emploi mal connu, apparu en 1998 dans les trois régions du pays, sous l'impulsion du Ministre fédéral de l'emploi de l'époque. Il était le fruit d'un accord de coopération conclu entre le Fédéral et les trois Régions, la Communauté française, et la Communauté germanophone. En Région wallonne, ce dispositif a fait l'objet d'une réforme récente mais profonde. En Flandre, un nouveau décret sur le PTP (appelé là-bas WEP+) est en préparation. A Bruxelles, les programmes PTP fonctionnent « en pilote automatique » depuis 10 ans. Une évaluation du dispositif a eu lieu en 2002, mais elle n'a jamais été diffusée ni discutée. Pourtant, ce dispositif est très intéressant en termes d'insertion socioprofessionnelle. Particularité bruxelloise : les programmes PTP se destinent à offrir une expérience d'emploi valorisante de deux ans maximum à des demandeurs d'emploi infra-qualifiés . Ils sont engagés sous contrat temps plein et payés comme tel, mais en réalité, un cinquième de leur temps de travail est dégagé pour leur formation. Notre dossier se divise en deux grandes parties. Le coeur de ce dossier, c'est ce que nous avons appelé entre nous notre « Manifeste PTP ». Ce document a été communiqué, début mars, au Ministre Cerexhe et au Directeur général d'ACTIRIS. Nos membres y font part de leurs observations, de leurs pratiques, de leurs expériences et de leurs revendications vis-à-vis du programme de transition professionnelle. Le reste du dossier illustre la réalité des programmes PTP en fournissant quelques données chiffrées et en donnant un « coup de projecteur » sur l'un d'entre eux : la Régie mobile d'Etterbeek. Enfin, nous revenons sur une action que nous avions menée l'année passée avec notre partenaire néerlandophone Tracé Brussel : une série de réformes techniques à entamer au niveau de la réglementation, de façon à améliorer les possibilités de transition des travailleurs PTP sur le marché de l'emploi.
INTRODUCTION
Les Missions Locales et les employeurs PTP souhaitent réaffirmer que :
- les objectifs ci-dessus correspondent à des besoins réels
- leurs pratiques, collant étroitement aux réalités locales, sont différenciées pour mieux rencontrer les objectifs assignés aux projets
- une évaluation concertée des mises en ?uvre du programme PTP, dans tous ses aspects, permettrait aux employeurs et aux autorités régionales de tracer des orientations futures.
Sur cette base, elles souhaitent vivement que la politique menée par les projets PTP non seulement se poursuive mais s'amplifie. Cela signifie qu'elles souhaitent que la Région fasse un appel à projets pour que les 1.000 postes prévus pour Bruxelles soient pourvus. Elles s'inscrivent totalement dans le souci du gouvernement bruxellois d'augmenter le nombre de postes PTP en faveur des jeunes de moins de 25 ans.
Dans cette perspective, les Missions Locales et autres employeurs PTP ont pris l'initiative de rédiger le présent document, afin de mettre en lumière les aspects positifs du programme, d'en lever les difficultés, de rester à la hauteur de ses exigences et donc, d'émettre des propositions et des revendications pour que ce programme non continue et augmente ses capacités.
RAPPEL DE LA REGLEMENTATION (3)
ENGAGEMENTS FINANCIERS DES PARTIES A L'ACCORD DE COOPERATION
Pour chaque création d'emploi PTP, la Région bénéficie, on le voit, d'apports financiers fédéraux considérables.
LE PUBLIC
Ne possède pas un diplôme homologué de l'enseignement secondaire supérieur et est soit
- Inscrit comme DE et âgé de moins de 25 ans
- Bénéficie d'allocations d'attente, de chômage, de l'intégration sociale ou d'une aide sociale financière depuis au moins 9 mois sans interruption
soit
- Inscrit comme DE
- Bénéficie d'allocations d'attente depuis au moins 12 mois, ou d'allocations de chômage, d'intégration sociale ou d'aide sociale financière depuis au moins 12 mois sans interruption.
LES OBJECTIFS
- Viser à rencontrer des besoins collectifs de société qui ne sont pas ou pas suffisamment rencontrés par le circuit de travail régulier
- Créer des emplois supplémentaires (calculés par rapport à la moyenne des travailleurs).
LES OBLIGATIONS DE L'EMPLOYEUR
- Occuper les travailleurs dans des tâches décrites dans la convention
- Engager le travailleur dans les six mois (de l'accord de l'Orbem ou du jour où le poste accordé est inoccupé).
LE PUBLIC : LES TRAVAILLEURS EMBAUCHES EN PTP
Vu les objectifs poursuivis par le programme PTP et la structure du chômage à Bruxelles, les travailleurs embauchés dans les projets PTP sont, dans leur toute grande majorité, très éloignés du marché du travail « normal ».
On rencontre chez les travailleurs PTP tous les types de difficultés liées à la sous-qualification (ou à l'absence de qualification) et à la précarité : surendettement, difficultés de logement, assuétudes, discriminations à l'embauche, absence de connaissance des « habitudes » de travail (non-respect des horaires, non-distinction entre vie privée difficile et nécessités du travail, absences ou retards à répétition etc.), et, partant, grandes difficultés administratives. Ces difficultés ne se précisent chez chaque travailleur qu'après l'embauche. Ce n'est qu'en situation de travail qu'elles se découvrent et se matérialisent. Elles sont alors gérées, accompagnées et encadrées, là où un employeur « normal » opterait illico pour le licenciement. L'accompagnement des travailleurs PTP, c'est du travail au cas par cas, complètement adapté à la situation de chacun.
On peut dire que les travailleurs PTP ont tous fait un parcours d'exclusion, avant d'entamer leur Parcours d'Insertion.
Si on veut comparer, le public embauché en PTP se révèle en moyenne encore plus éloigné du travail que les stagiaires en ISP. En effet, les travailleurs PTP dans les métiers manuels ne peuvent apprendre autrement qu'en travaillant, ils ont un besoin absolu d'avoir un salaire sûr et une structuration de leurs temps de vie, alors qu'ils ne sont pas dans les conditions minimum objectives de décrocher un emploi autre qu'un emploi très marginal. Les travailleurs PTP dans les métiers autres que manuels sont souvent des demandeurs d'emploi « rentrants » après de nombreuses années de non-emploi, ou ont connu les errances réservées chez nous aux migrants clandestins.
LES PRATIQUES DES EMPLOYEURS BRUXELLOIS : MISSIONS LOCALES, OISP, ILDE
DES OBJECTIFS INDIVIDUALISES POUR CHAQUE TRAVAILLEUR PTP
Les travailleurs PTP peuvent avoir le projet
- De travailler, « simplement » (ce qui pour lui, ne s'avère pas simple du tout), de retrouver une dignité, une place, un statut social, une reconnaissance. Le port d'un uniforme de travail par exemple, leur procure une vraie fierté.
- De travailler après avoir suivi une formation. Le travail s'avère alors le « couronnement » de leur formation.
- D'apprendre un métier précis pour l'exercer plus tard chez un employeur « ordinaire » dans un secteur qui embauche (ex : maçon, peintre, commis de cuisine etc.) et d'acquérir pour cela les savoirs techniques et comportementaux nécessaires. Le travail est alors le début du processus de formation, de (re)qualification, et d'insertion.
- De se réorienter éventuellement après leur contrat PTP. L'épreuve de la réalité du travail peut leur avoir montré que s'ils ont acquis des compétences (sociales et techniques) , ce n'est pas dans le métier qu'ils ont appris qu'ils veulent faire carrière.
- De se qualifier en suivant une formation certifiante au cours de leur emploi PTP.
DES OBJECTIFS POUR LA COLLECTIVITE
Rendre des services à la collectivité tels que :
- Lavoir social réservé à certaines personnes particulièrement défavorisées,
- Rénovation de logements sociaux, de bâtiments communaux, d'associations,
- Réfection d'espaces publics, entretien d'espaces verts et de voieries,
- Animation de jeunes de quartiers populaires,
- Communication associative,
- Garde d'enfants de demandeurs d'emploi, gardes-malades,
- Soutien logistique pour projets culturels,
- Cafeteria de piscines publiques.
L'EMBAUCHE DU PUBLIC-CIBLE
Le recrutement et la sélection se font le plus souvent parl'employeur, éventuellement après une sélection faite par ACTIRIS et surtout grâce au bouche-à-oreille. En moyenne, 5 à 6 candidats se présentent pour un poste vacant. Les travailleurs sont « très difficiles à placer » en général, sont de tous âges, et ont généralement mais pas toujours, un passé très lourd (ex-toxicomanes, ex-détenus, personnes très peu scolarisées etc.. Voir plus haut).
L'ENCADREMENT ET L'ACCOMPAGNEMENT : TOUT UN METIER !
Rappelons que les situations de départ des travailleurs PTP sont souvent graves, inextricables, et qu'elles sont le résultat d'un parcours d'échecs répétés. Il s'agit, en deux ans - dans certains cas, c'est terriblement court - de construire le parcours nécessaire pour arriver à un énorme changement, un renversement : un parcours de réussite.
Dans tous les cas, l'encadrement est quotidien, même dans les cas où l'activité (traiteur, bâtiment) est exercée hors du siège social : l'évaluation des progrès et des difficultés est faite tous les jours dans tous les projets.
Le métier d'encadrant PTP est un métier qui n'existe nulle part ailleurs. Il requiert autant des qualités et connaissances techniques que des qualités humaines et pédagogiques. Il faut vouloir et pouvoir encadrer des travailleurs « difficiles » soit par leur manque de connaissance du métier, soit par leur manque d'habitudes de travail (conflits, lenteur, retards, compréhension des consignes etc.). Certaines structures se sont ainsi dotées d'un ou de plusieurs encadrants d'encadrants. Sortes de superviseurs et de super-pédagogues, ils ont une longue expérience dans le technique, dans la pédagogie et dans le social.
L'encadrement, l'accompagnement et la formation peuvent être faits soit par la même personne soit par plusieurs personnes. Le travail consiste en tout cas à
- Former les travailleurs PTP techniquement;
- Encadrer et assurer la bonne fin du travail ;
- Former aux attitudes et aux réalités de travail (travail en équipe, respect du règlement de travail, des horaires, de la qualité) ;
- Gérer la multiculturalité là où, de fait, les communautarismes agissent de façon exacerbée (certains métiers ou emplois sont quasiment organisés en filières communautaires) ;
- Accompagner sur les plans administratif et social. Même si les problèmes sociaux sont gérés par ailleurs, ils existent et influencent le travail produit. Il faut donc lever ces obstacles au bon déroulement du travail et de la formation, à tout le moins repérer les problèmes et orienter les travailleurs vers des services spécialisés;
- Et finalement trouver les moyens de faire se rencontrer les aptitudes du public-cible PTP, les niveaux de qualité, de rentabilité et de compétences exigées par les entreprises « normales ».
- Les encadrants PTP sont en fait des « moutons à cinq pattes », rares, précieux, totalement engagés dans leur métier, et... extrêmement difficiles à trouver.
Le cumul de toutes ces fonctions s'avère souvent incompatible. On ne peut à la fois traiter les problèmes sociaux et sanctionner (pour des retards répétés par exemple). La fonction est en pratique souvent scindée dans des emplois distincts, ce qui n'est possible que dans les structures où il y a plusieurs encadrants.
Sans oublier que cette fonction est rémunérée en moyenne par un salaire mensuel brut moyen de 1.700 à 1.900 euros. Oui, ce sont bien des moutons à cinq pattes... et pourtant sans eux, pas de projets PTP.
LA FORMATION DES TRAVAILLEURS PTP
UNE FORMATION ESSENTIELLEMENT PAR LA PRATIQUE
L'apprentissage, c'est maintenant bien connu, ne peut se faire que si l'environnement est sécurisant. Cela suppose qu'une série de problèmes soient réglés - c'est le travail d'accompagnement - pour que la disponibilité à l'apprentissage et la confiance en soi existent. La bienveillance à l'égard des travailleurs, liée à une exigence de qualité, sont des outils de travail indispensables. L'engagement des encadrants va donc bien au-delà de ce qui est nécessaire dans un travail « normal ».
Sans pratique, donc, pas d'apprentissage possible pour ce type de public. Le travail est donc bien réel, la production, les chantiers, les services, le matériel, tout est « normal », comme dans les autres entreprises. Ce qui diffère, c'est l'encadrement, la tolérance aux erreurs, le temps consacré à leur correction, la fixation des objectifs à atteindre mêlant patience et faisabilité, et la pédagogie liée au travail presté. Et, bien sûr, la prise en charge de solutions des problèmes périphériques (sociaux, de santé etc.). La formation se fait constamment et de toutes les manières possibles, au cours des tâches à accomplir.
Concrètement, quand il s'agit de rénover une façade, celle-ci le sera parfaitement. Le temps pour y arriver aura par contre été (beaucoup) plus long, puisqu'il faut se rappeler que le degré de productivité ou d'efficacité d'un travailleur PTP va, au fur et à mesure du déroulement de son contrat, de 30% à 70%.
UN CINQUIEME DU TEMPS AU MOINS DE FORMATION « FORMALISEE »
Une formation plus « théorique », de l'ordre d'un cinquième-temps, est également mise sur pieds. Elle peut :
- être organisée en interne (par l'encadrant technique par exemple)
- se faire à l'extérieur, dans un OISP ou en promotion sociale, qu'elle soit ou non certifiante (ex : auxiliaire de la petite enfance, éducateur, régisseur)
- consister en d'autres types de formation, que ce soit chez des fournisseurs (de matériel d'étanchéité de toiture par exemple), ou chez des partenaires tiers (centre culturel pour les régisseurs par exemple.
UNE FORMATION COMPLEMENTAIRE AU 1/5EME TEMPS, FACULTATIVE OU OBLIGATOIRE, LE SOIR OU EN JOURNEE
Pour l'exercice de certains métiers, un diplôme est requis (ex : régie plateau, auxiliaire petite enfance, VCA). L'organisation du travail intègre alors la formation des travailleurs, en sorte qu'ils aient leur diplôme à la fin de leur contrat PTP.
Autre cas : certains travailleurs choisissent de travailler en PTP pour se remettre en selle et percevoir un salaire, mais souhaitent, à terme, réorienter leur carrière vers un autre métier. Tout comme un travailleur « ordinaire » pourrait vouloir le faire, ill peut alors, si c'est un objectif de réinsertion fixé en accord avec son employeur, suivre une formation - certifiante ou non - ailleurs, pendant son temps de travail (comme c'est prévu par exemple dans le dispositif congé-éducation).
Et enfin, certains métiers requièrent fréquemment des mises à jour des connaissances théoriques. Elles peuvent être faites à l'extérieur (ex : formation aux nouveaux matériaux d'étanchétité de toiture, assurées par le fournisseur).
Ce n'est qu'à ce prix que le degré de productivité et d'efficacité des travailleurs peut croître de manière significative. Car... en deux ans, on ne « rattrape » pas un parcours d'échec scolaire avec toutes les conséquences sociales, médicales, financières et administratives qui s'ensuivent, sans y mettre une énergie énorme et les moyens adéquats.
LA GESTION DES PTP AFFECTES A DES TIERS
Dans certains projets, cette affectation extérieure s'avère indispensable. Pourquoi ? Parce que les habitudes de travail ne peuvent s'acquérir que via la confrontation avec plusieurs milieux de travail. Ce n'est qu'en permettant aux travailleurs PTP de varier leurs expériences, de se confronter à des réalités, des exigences, des organisations de travail différentes, que la distance avec le marché du travail pourra se réduire réellement.
LES PRATIQUES DE MISE A L'EMPLOI A L'ISSUE DES CONTRATS PTP
Les Missions Locales assurent généralement le suivi pour la mise à l'emploi des PTP après leur emploi de transition. Toute une série de techniques sont développées pour que « ça marche »:
- Jobcoaching préalable à l'engagement
- Prospection des employeurs en vue du placement des PTP
- Suivi social durant les premiers mois d'embauche
- Stages dans des entreprises qui engagent
- Atelier de Recherche Active d'Emploi
- Mise sur pied d'un comité d'accompagnement des PTP avec des patrons du secteur (pour « ouvrir » le secteur aux travailleurs PTP et pour superviser le programme de formation) se réunissant à chaque fin de contrat
- Coaching dans l'entreprise qui engage
- Utilisation des clauses sociales dans les marchés publics
- Etc.
NOS REVENDICATIONS
GARDER LES SPECIFICITES DES PROJETS PTP
Certains projets PTP peuvent, vu leur nature, demander leur agrément comme ILDE, car leurs activités s'inscrivent dans des relations commerciales ou monnayées à tout le moins. D'autres sont en dehors de ce champ et sont de nature sociale ou culturelle. Cela n'enlève rien à la nature du travail d'insertion socio-professionnelle des projets PTP.
AUGMENTER LE NOMBRE DE POSTES PTP A BRUXELLES EN UTILISANT PLEINEMENT LE DROIT DE TIRAGE REGIONAL
Puisque la Région, à travers ses différents plans, veut agir sur le chômage des moins qualifiés, elle doit à tout le moins tirer du budget fédéral tout ce qui lui est réservé pour le programme PTP (plus de 1000 postes). Actuellement, moins de 600 postes sont ouverts. Il faut donc rapidement ouvrir plus de 400 postes. La FeBISP et ses membres souhaitent que cela se fasse par appel à projets, sur base des priorités de la Région. Cela permettra entre autres d'augmenter le nombre d'ILDE et, ainsi, de promouvoir de nouvelles initiatives bruxelloises d'économie sociale. La FeBISP et les missions locales, particulièrement à même d'évaluer l'impact des projets PTP, et de relayer les besoins des chercheurs d'emploi et les besoins collectifs locaux, souhaitent être concertées sur les priorités qui seront inscrites dans ces appels à projets, en espérant que ceux-ci pourront se baser sur une évaluation des projets existants.
AUGMENTER LE NOMBRE D'ENCADRANTS
- Tout projet PTP doit, sans cela il n'est pas réalisable, bénéficier d'encadrants dont il faut financer le salaire, puisque leur métier n'est pas de produire mais de permettre la production. La production n'est jamais suffisante pour financer un encadrement quel qu'il soit. Le cadre ACS est pertinent pour ce type d'emploi qualifié, dont la fonction n'est pas remplie dans un autre cadre public ou privé.
- La norme de 1 encadrant pour 4 travailleurs PTP est suffisante pour l'encadrement « ordinaire » de ce type de travailleurs. Par contre, on l'a vu plus haut, l'encadrement social requiert de très gros moyens humains. En moyenne, 1 encadrant pour 12 travailleurs PTP devrait être financé en supplément soit dans les missions locales soit dans les projets eux-mêmes
FINANCER LA FORMATION DE TOUS LES TRAVAILLEURS PTP
A l'origine, les travailleurs PTP étaient embauchés à 4/5ème temps. Le 1/5ème temps restant devait être consacré à leur formation. La Région a trouvé un financement (via le Fonds Social Européen) pour les postes PTP embauchés dans les Missions Locales. Le système continue en tout cas jusqu'en 2013.
Mais depuis, d'autres Missions locales et d'autres structures ont embauché des PTP, sans financement. Il s'agit maintenant de ne pas continuer à pénaliser l'insertion de ces PTP par rapport aux premiers. Car les employeurs PTP s'engagent à former, leurs travailleurs PTP au moins 1/5ème temps. Ainsi, la formation pourrait être financée via la création d'un fonds spécial de formation pour les travailleurs PTP régionaux, ou via le financement direct des structures qui les emploient.
Il faut rappeler que les efforts de formation des commissions paritaires (les formations « groupes à risques) sont loin de pouvoir offrir l'équivalent en formation de 1/5ème temps par travailleur (rappel : les cotisations aux fonds groupes à risques représentent 1% de la masse salariale, soit 1/100ème temps).
RESOUDRE LES PROBLEMES ADMINISTRATIFS LIES AU STATUT PTP
Des solutions administratives et réglementaires doivent être trouvées au niveau régional et surtout au niveau fédéral pour aligner les droits des travailleurs PTP sur ceux des autres travailleurs en termes notamment de réglementation chômage. Un seul exemple : un travailleur PTP qui travaille deux ans, s'il retombe au chômage, retrouve ses allocations au niveau où elles étaient avant qu'il travaille, alors qu'un travailleur ordinaire peut en remonter considérablement le montant par le simple fait qu'il ait travaillé un certain nombre de mois.
Une note technique a été envoyée aux autorités concernées, qui fait le point exhaustif sur tous les problèmes à résoudre.
FACILITER L'ACCES A DES FONDS D'AIDE A L'INVESTISSEMENT
ET ENFIN (ET SURTOUT) : UN POSITIONNEMENT DE LA REGION
Quelle est la position de la Région ? Soutient-elle ce type de projets ? Veut-elle augmenter leur nombre ? Quelle visibilité veut-elle leur donner ?
UNE CAMPAGNE DE COMMUNICATION
La Région doit penser à communiquer sur les projets, leurs objectifs et leurs réalisations. Elle pourrait envisager un Label PTP, dont le lancement serait appuyé par une conférence de presse. Il s'agit tout de même de plus de 600 emplois qu'elle finance avec l'aide du fédéral !
Quelques chiffres
Dès leur lancement en 1998, la Région Bruxelloise s'était engagée à créer 1.000 postes PTP répartis comme suit : 300 postes pour les Missions Locales et OOTB ; 500 postes pour les écoles de la communauté française et de la communauté flamande. 150 postes pour les quartiers d'initiative (dont propreté publique), 50 postes pour les projets transversaux (dont logement social et propreté publique). Fin 2006, il restait à Bruxelles 761 postes PTP en tout.
En novembre 2006, la FeBISP a mené une enquête auprès des Missions Locales et a compilé les données dont elle disposait sur l'emploi dans les ILDE francophones, néerlandophones et bilingue. Elle a dénombré 293 emplois PTP dont 154 dans les 19 projets agréés comme ILDE, les 139 autres PTP étant employés dans les Missions Locales, au sein de 16 projets. En moyenne, les projets PTP emploient 8 travailleurs PTP, avec un encadrement moyen de 1 encadrant ACS pour 4 PTP. Les secteurs d'activité privilégiés des projets PTP sont la construction (rénovation intérieure et extérieure), l'embellissement et la propreté de l'espace public, les services aux personnes, mais on trouve également des projets PTP centrés sur les métiers de l'animation ou de l'horeca. Il n'y a pas de différence marquante entre les projets PTP francophones et néerlandophones, si ce n'est que du côté néerlandophone, la plupart des projets PTP sont agréés comme ILDE.
A quelques postes près, les chiffres actuels, début 2008 ne sont pas différents des chiffres de fin 2006.
COUP DE PROJECTEUR SUR LA REGIE MOBILE D'ETTERBEEK
La Régie Mobile d'Etterbeek est un projet de transition professionnelle créé en 1998 par la Mission Locale d'Etterbeek et, à ce jour, toujours unique à Bruxelles. Son objectif ? Former des régisseurs son et lumière et accompagner leur insertion dans le secteur socioculturel.
Sur le papier, cela semble nickel. Des personnes en décrochage professionnel sont épaulées dans leur effort de réorientation par la petite équipe de la Régie mobile (un responsable, deux coordinateurs et des formateurs extérieurs). Et ce, quel que soit leur âge. Les candidats pouvant avoir aussi bien 20 que 40 ans. Autre condition : le niveau d'études qui doit correspondre au secondaire inférieur. La majorité des candidats sont des hommes bien que certaines femmes n'hésitent pas à se glisser derrière les consoles.
La prise en charge de la Régie mobile inclut l'organisation d'un stage d'une durée de deux mois (effectué dans différentes salles de spectacles bruxelloises), de quelque 600 heures de cours théoriques et bien sûr, la mise au boulot, avec des supervisions régulières. Le tout pendant deux ans. La Régie mobile s'efforce par ailleurs d'obtenir pour ses poulains (et pouliches!) un maximum de contrats à durée indéterminée. La mise à l'emploi dans le secteur socioculturel est de 40%.
Dans la pratique, cette remise en selle suppose un immense effort de volonté de la part de tous. Car régie rime avec rigueur. Cette rigueur commence par la ponctualité et finit par le doigté. Une exigence qui est toutefois largement compensée par la variété du boulot et une certaine mobilité. La flexibilité est, en effet, une qualité à développer impérativement.
« Le spectacle est une école de vie », avance Roberto Cordova, artiste et responsable de la Régie mobile, « notre programme ne réussit pas à tous les coups (le taux de réussite avancé est de 50%) mais quelle satisfaction quand on y arrive! La motivation est en fin de compte le seul profil recherché. »
Par ailleurs, cette profession en évolution constante - l'informatique y est pour quelque chose - nécessite, on s'en doute, autant de finesse technique que relationnelle. Car quoi de plus indispensable à la réussite d'un spectacle que la présence discrète mais efficace de spécialistes de la lumière et du son.
Côté pile, l'avantage de la formule semble évident. Le candidat à la réinsertion bénéficie d'un encadrement adéquat et entre directement en contact avec la réalité professionnelle, tout en bénéficiant d'un salaire et d'une vie sociale. Côté face, l'accueil d'un régisseur de la Régie mobile permet aux organisateurs de spectacles d'évoluer en toute tranquillité vers une collaboration professionnelle solide. « « Aujourd'hui, avec l'évolution technique et esthétique, il n'est pas rare qu'un régisseur combine les qualités d'un cameraman à celles d'un régisseur de plateau. Or, il arrive que des salles investissent dans du matériel cher mais ne pensent pas à s'assurer les services d'un spécialiste pour l'utiliser. »
En réalité, à chaque salle son régisseur. Il faut que les tempéraments correspondent! Ainsi, il faut parfois 3 ou 4 essais avant de trouver un régisseur qui correspondra à l'esprit qui anime le lieu. Bruxelles compte une myriade de salles de spectacle mais l'ambiance d'un centre culturel comme celui de Woluwé-Saint-Pierre est totalement différente de celle d'une petite salle comme la Samaritaine par exemple. « Un bon candidat doit être flexible, capable de prendre du recul, avoir du tact car finalement il occupe une position unique entre les artistes et le public. Une bonne régie, c'est 60% de la réussite d'un spectacle.»
La Régie mobile a par ailleurs établi des partenariats de longue date avec des manifestations récurrentes comme le festival Babel ou le Kunstenfestival des Arts. Quant à savoir à quoi pense un régisseur avant le lever de rideau, c'est très simple, il flippe! « C'est comme les acteurs, ils ont le tract, affirme la cheville ouvrière de la Régie mobile. »
Voilà qui devrait nous inciter à jeter un regard neuf sur ces travailleurs de l'ombre...
Renseignements complémentaires: http://www.regiemobile.org
EN MAI 2007, LA FEBISP ET TRACE BRUSSEL ENVOYAIENT AU MINISTRE CEREXHE ET A ACTIRIS (QUI S'APPELAIT ENCORE A L'EPOQUE ORBEM), UNE NOTE REPRENANT UNE SERIE DE DEMANDES TRES TECHNIQUES CONCERNANT LE DISPOSITIF PTP.
En mai 2007, la FeBISP et Tracé Brussel envoyaient au Ministre Cerexhe et à ACTIRIS (qui s'appelait encore à l'époque ORBEM), une note reprenant une série de demandes très techniques concernant le dispositif PTP. Depuis lors, deux réunions rassemblant ACTIRIS et le Cabinet Cerexhe ont eu lieu pour discuter des points de cette note. Certains des aspects qui relèvent de l'administration bruxelloise sont en passe d'être résolus, comme l'embauche le premier du mois et le décompte en semaines plutôt qu'en mois (point 3.2 de la note ci-dessous). Les points qui relèvent du fédéral n'ont pu être traités à l'heure où nous rédigeons ces lignes, étant donné que nous sommes restés presque une année sans gouvernement fédéral. Ci-dessous, nous présentons les points de cette note légèrement résumés.
Préambule
Les acteurs associatifs d'insertion socioprofessionnelle bruxellois sont convaincus que le dispositif PTP constitue un bon instrument pour ramener vers le marché du travail des personnes qui s'en trouvent exclues. Cependant, il ressort d'un certain nombre de discussions entre acteurs de terrain que des aménagements du dispositif réglementaire qui régit ces programmes sont nécessaires pour en améliorer le fonctionnement et parvenir à une plus grande efficacité de ceux-ci. (..)
1. LA MISE EN CONTACT DES PTP AVEC LE MONDE DU TRAVAIL TEL QU'ILS Y SERONT CONFRONTES A L'ISSUE DE LEUR CONTRAT PTP
Le but de l'emploi sous statut PTP est de favoriser l'intégration des travailleurs PTP sur le marché du travail « classique ». Or, la législation est ainsi faite que pendant la période d'occupation sous contrat PTP, les travailleurs sont de fait maintenus à l'écart du marché du travail classique : ils n'ont ni la possibilité de se confronter à la réalité d'un travail ailleurs que dans le projet, ni la possibilité de montrer leur savoir-faire à des entreprises. Pour remédier à cela nous plaidons pour :
- La possibilité d'une mise à disposition limitée dans le temps de travailleurs sous statut PTP auprès d'entreprises des secteurs auxquels les préparent l'expérience de travail sous contrat PTP (l'équivalent du stage pour les stagiaires en formation)
- La possibilité pour un projet PTP de travailler en sous-traitance pour une entreprise tant que le client final est un client éligible pour le projet PTP.
2. LE STATUT DES TRAVAILLEURS EN REGARD DE LEURS DROITS SOCIAUX
Les travailleurs PTP sont des travailleurs à qui s'appliquent l'ensemble des devoirs du contrat de travail. En revanche, ils ne bénéficient actuellement pas de tous les droits qui découlent du fait d'avoir travaillé. En effet, si une personne ne preste pas les deux ans pleins d'un contrat PTP, elle ne verra intervenir aucune amélioration de ses droits sociaux : une personne bénéficiant d'allocations d'attente avant son contrat PTP retrouvera ainsi, à l'issue de son contrat, des allocations d'attente et non pas des allocations de chômage. Dans les mêmes conditions, une personne bénéficiant d'un RIS ou d'une Aide sociale avant son contrat PTP, retrouvera à l'issue de son contrat un RIS ou une Aide sociale et n'aura pas droit au chômage. Notre point de vue est que le travailleur PTP doit pouvoir bénéficier du même traitement que les autres travailleurs par rapport à ses droits aux allocations de chômage, et pouvoir bénéficier d'allocations de chômage s'il a presté un nombre de mois de travail suffisants en fonction de sa situation.
D'autre part, les travailleurs PTP qui, dans l'espoir de décrocher un emploi durable, quittent leur employeur pour commencer un contrat de travail sous statut ouvrier chez un autre employeur sont passibles d'une suspension de leur droit au chômage allant jusqu'à 26 semaines s'ils se voient licenciés par leur nouvel employeur avant d'avoir presté 4 semaines de contrat. Si cette règle est d'application pour tout travailleur, qu'il soit PTP ou non, nous jugeons que dans le cadre de l'emploi PTP cette règle est contreproductive, dans la mesure où, même si une bonne offre d'emploi se présente, un travailleur PTP n'a pas intérêt à changer de statut en cours de contrat de peur de perdre son droit à la sécurité sociale. C'est contraire à la logique de l'emploi de transition et nous demandons que la possibilité de modifier cette règle dans le cas du PTP soit étudiée.
3. L'AMELIORATION DES PROCEDURES ADMINISTRATIVES
- Une meilleure circulation de l'information entre employeurs, travailleurs et administrations gestionnaires (CPAS, ONEM, ACTIRIS,...)
- L'assouplissement de certains aspects du dispositif.
- L'engagement de PTP dans le cadre d'un contrat de remplacement devrait pouvoir se faire à d'autres dates qu'au 1er du mois.
- La période de deux ans de droit à la prime ORBEm pour un travailleur donné devrait être comptabilisée en semaines plutôt qu'en mois, de façon à pouvoir prolonger le contrat d'autant de semaines qu'il a été absent au cours de son contrat.
- Les modalités de financement de la mesure
- Les travailleurs PTP touchent une part de leur salaire, la prime d'intégration, directement d'une caisse de paiement agissant pour compte de l'ONEm, ou d'un CPAS, via l'introduction du document C78 émanant de leur employeur. Le paiement de leur salaire est ainsi morcelé tant quant à sa source que dans le temps.
- Nous voudrions que les primes d'intégration soient versées à l'employeur de manière à ce que l'employeur puisse payer en une fois les travailleurs PTP comme cela se fait dans le système SINE.
- La loi permet de rompre un contrat de travail, avec indemnité de rupture égale à la rémunération d'un préavis, pour des personnes n'exerçant aucune prestation (souvent incapacité de travail pour raisons médicales) plus de 6 mois d'affilée. Nous voudrions voir financées les indemnités de rupture pour des travailleurs PTP étant absents de manière continue depuis plus de 6 mois. En effet, souvent, les raisons qui sous-tendent ces longues absences font qu'une réintégration au projet ne fait pas sens et que libérer le poste au profit d'une autre personne s'impose, notamment pour garantir la qualité du service presté.
4. L'ENCADREMENT DES TRAVAILLEURS PTP
- Nous voudrions plus de souplesse quant au diplôme requis pour occuper les postes d'encadrants PTP : ce sont souvent des conventions A1 qui ont été octroyées, aussi pour des métiers techniques tels que le bâtiment par exemple. Or dans ce cadre, l'expérience professionnelle et le vécu des personnes comptent plus que leur diplôme. L'exigence d'un diplôme élevé est un obstacle en plus au recrutement d'un personnel d'encadrement de qualité.
- Nous voudrions, par ailleurs, une meilleure valorisation de l'expérience professionnelle antérieure du personnel d'encadrement. Pour attirer un personnel d'encadrement de qualité vers les projets (ce qui est une condition importante de l'apport des projets aux travailleurs PTP), nous devons pouvoir salarier correctement ces personnes. Les projets PTP qui se déploient dans le champ de métiers dits « fonctions critiques » doivent pouvoir rivaliser avec les entreprises pour attirer et garder un personnel d'encadrement de qualité. Ceci est une vraie gageure, vu, déjà, les conditions en terme de chômage qui conditionnent l'accès aux emplois ACS.
- Dans le même esprit, l'exigence de 6 mois de chômage préalablement à l'embauche sous contrat ACS, pour des encadrants PTP de moins de 40 ans, sur des métiers dits « fonctions critiques », devrait être levée.
5. L'OUTPLACEMENT
Depuis peu, le paiement d'un service d'outplacement est une obligation pour tout employeur licenciant une personne de plus de 45 ans. Nous voudrions une exception pour ce qui est des travailleurs PTP. En effet, le travail d'accompagnement à la recherche d'emploi réalisé par le secteur de l'insertion socioprofessionnelle est absolument équivalent à ce que proposent les services d'outplacement qui sont par ailleurs très coûteux (+/- 2500 € par travailleur).
NOTES DE BAS DE PAGE
1) 4 MARS 1997 - ACCORD DE COOPERATION entre l'Etat fédéral et les Régions relatif au programme de transition professionnelle.
2) Pour être précis, des dérogations à ce principe sont possibles, mais elles sont rares.
3) 2 A-R fédéral sur l'ONSS, 1 A-R fédéral sur la promotion de l'emploi des DE de longue durée, 1 A-R fédéral sur le chômage, 1 ordonnance bruxelloise et 1 arrêté d'exécution portant assentiment d'un accord de coopération entre Etat fédéral et Régions, et 1 loi sur la mise à disposition de PTP + une série de lois et arrêtés sur les aspects financiers
4) Certaines Missions Locales ont fait agréer leur projet PTP en tant que ILDE, d'autres, non.
5) Sur base d'une interview réalisée par Elysabeth Loos pour le magazine de théâtre « Le Petit Plus ».