SUR LE VIF: AU DEPART, UNE INITIATIVE VOLONTAIRE ...

Dans le secteur de l'insertion socioprofessionnelle, on n'a pas attendu d'y être contraint pour se lancer dans la formation continue. Le Fonds de la Formation Continuée des travailleurs de l'ISP bruxelloise a été institué dans le cadre de l'Accord non marchand et a d'emblée imposé une dotation de 1% de la masse salariale financée par les pouvoirs subsidiants (Actiris pour les Missions Locales, Cocof pour les Oisp). Par ailleurs, suite à l'accord interprofessionnel du 18 novembre 1988 instaurant une cotisation obligatoire prévoyant « des initiatives pour l'emploi et la formation des groupes à risque », les Commissions paritaires du Non Marchand ont progressivement créé, par Convention collective de travail (CCT), des Fonds sectoriels ayant notamment des objectifs liés à la formation. Dans cette perspective, le Fonds de sécurité d'existence de la Commission Paritaire 329 pour les Communautés française (Wallonie Bruxelles) et germanophone a été créé le 20 mars 1997 par une CCT, rendue obligatoire par A.R. du 22 octobre 1997, alimenté par une cotisation de 0.1%, prélevée sur les cotisations de sécurité sociale, fixée dans les accords interprofessionnels.

Michèle Hubin

LA SPONTANEITE DEVIENT UNE OBLIGATION ...

Le dernier accord interprofessionnel (2007/2008) a enjoint les secteurs à élaborer, dans le cadre de la concertation sociale biennale, des pistes appropriées afin d'intensifier leurs efforts en matière de formation. Concrètement, cela signifie que les secteurs doivent négocier, à l'échéance de septembre 2008, des accords visant à :

  • soit accroître l'investissement annuel en formation de 0,1% de la masse salariale ;
  • soit augmenter annuellement le taux de participation des travailleurs aux formations

Ces deux domaines d'action peuvent se décliner en différentes actions : engagement à réaliser des plans de formation, augmentation de la cotisation aux fonds de formation, etc.

En outre, l'Arrêté royal du 10 février 2008, a apporté un certain nombre de modifications au bilan social visant notamment, à accroître la visibilité en matière d'efforts de formation consentis par les entreprises. Rappelons que le bilan social est une obligation annuelle incombant à toute asbl qui occupe au moins 20 Equivalents temps plein (ETP). Evidemment, ce seuil ne concerne pas tout le monde, en particulier, nos « petits » Oisp, mais les indicateurs qui en découlent peuvent aider à prendre le pouls du terrain. À titre d'illustration, les indicateurs de formation issus des bilans sociaux entre 2002 et 2006 font état d'un pourcentage de 1,09 % des frais de personnel consacrés à la formation  « formelle ».

S'IL EST ENCORE BESOIN DE SE CONVAINCRE QUE, DANS LE NON MARCHAND, LES INTENTIONS SONT BONNES ...

Une piste lancée par l'Union Francophone des Entreprises du Non Marchand (UFENM) consiste à mettre sur pied un outil de mesure des efforts de formation. Il pourrait ressortir de cet outil deux utilités directes : une analyse des paramètres-clé de la consommation de formation et une visibilité pour chaque association de sa situation au regard des autres associations du secteur.

UNE REFLEXION EN MIROIR SUR LES OBJECTIFS DE L'INSTITUTION

Une autre initiative, celle du Fonds social socioculturel et sportif, joue les allures de précurseur dans la volonté d'impulser les initiatives de formation. En effet, dès 2006, faisant suite à l'évaluation des actions précédentes, le Fonds social socioculturel et sportif prend conscience qu'il apparaît important d'aider les associations à identifier et structurer leurs besoins en matière de compétences professionnelles. Former d'accord, mais qui, pourquoi, comment, avec quelles retombées pour l'association ? Autant de questions qui jaillissent sans que les besoins soient pour autant structurés. Dès lors, le Fonds lance une action pilote en matière de plan de formation. Elle consiste à proposer un soutien financier, méthodologique et un accompagnement individualisé afin de permettre aux associations du secteur de construire leur premier Plan de formation.

Vu le caractère expérimental de l'action, un maximum de 30 candidatures ont été sélectionnées. Parmi elles, celles de deux Missions Locales qui décident de relever le défi.

Par une grise matinée de printemps 2008, ainsi que cela avait été prévu, cette action pilote a donné lieu à une évaluation finale. C'était à Charleroi, où une quarantaine de personnes issues de 24 organisations du secteur ont fait le point sur la mise en ?uvre de l'opération « Plan de formation » dans leur structure, ainsi que sur leurs besoins en outils concrets. Une action pilote se devait bien de tirer quelques leçons avant de pouvoir étendre l'opération. Pour rappel, un plan de formation a pour objectif

d'aider les institutions à prendre elles-mêmes la mesure de leurs besoins individuels et collectifs par le biais d'une démarche pluriannuelle et collective.

Pour évaluer et mesurer les difficultés mais aussi les succès engrangés par ce projet-pilote, trois ateliers furent organisés. Tous avaient un seul souci : celui d'échanger les pratiques expérimentales afin d'en retirer des constats transversaux.

L'atelier auquel nous avons participé proposait une démarche en deux temps : une réflexion axée sur le déroulement du projet, une autre sur ses points positifs et écueils.

COMMENT ONT EVOLUE LES PROJETS ?

QUAND LA DEMARCHE A-T-ELLE DEBUTE ? Sauf exception et sans préjuger de son degré d'aboutissement, le chemin est long avant que la procédure n'arrive à maturation. La plupart font remonter leur réflexion de départ à environ trois ans.

PAR QUI EST PORTEE LA DEMARCHE ? Les initiatives se déclinent au cas par cas ; Conseil d'administration seul ou avec l'Assemblée générale, le responsable GRH, la direction (seule ou en partenariat avec la délégation syndicale), un comité de pilotage spécialement créé pour l'occasion. Et puis, il y a les situations plus complexes de « décrochage » d'un des partenaires comme cette expérience d'un comité de pilotage qui se lance dans une démarche précipitée sans assurer la diffusion du projet vers l'équipe se privant dès lors d'un essentiel relais du terrain.

AVEC QUEL SOUTIEN ? Ici encore, les réponses sont variables et dépendent souvent de la précédente en ce sens que l'initiateur du projet trouve souvent un relais dans les instances (CA, AG, Comité de direction, DS ou CPPT/CE). La plupart du temps, le soutien est venu en cours de démarche et l'expérience s'avère d'autant plus riche que le relais est assuré par des profils de fonction différents.

OU EN EST-ON DANS LA DEMARCHE ? La disparité des expériences fut riche d'enseignements. Certaines associations avouent n'en être nulle part ou alors aux balbutiements de la démarche tandis que d'autres ont déjà basculé dans « l'opérationnalisation » qui peut aller de la programmation et la mise en ?uvre d'actions de formation ou déboucher sur une supervision collective, conditionnelle à tout développement ultérieur de l'action.
Le travail en atelier s'est conclu sur l'établissement d'un bilan en procédant à un bref relevé des points positifs et négatifs. Les participants ont néanmoins relevé le caractère complexe de la démarche insistant sur les multiples détours de la concertation continue au fil du processus ainsi que sur le difficile passage entre la définition des besoins de compétences en besoins de formation. Mais dans le cas d'un aboutissement de la démarche « Plan de formation », les acteurs soulignent la possibilité de voir s'établir une clé de répartition entre formations collectives et formations individuelles : la réflexion permet un dosage « subtil » avec transparence. Plus globalement, elle permet de rationaliser les demandes. Et au-delà de l'analyse des besoins concrets, la réflexion enclenchée permet d'induire une réflexion en miroir sur les objectifs de l'institution. Expérience positive pour qui s'y lance avec ses lourdeurs, ses lenteurs, ses allures de grande bataille et de petites victoires.