SUR LE VIF : ACCORD DE GOUVERNEMENT : BEAUCOUP DE PLANS POUR PEU DE MOYENS

Les positions de la FeBISP par rapport à l'accord du gouvernement bruxellois et à l'accord du collège de la COCOF.

L'équipe de la FeBISP

L'EMPLOI EN RÉGION BRUXELLOISE

L'accord de gouvernement pose la priorité de l'emploi comme une des clefs de la politique de la Région. Pour ce faire, un Plan de Croissance Urbaine Durable (PCUB) et une Alliance Environnement-Emploi seront élaborés dans les mois qui viennent. Ces deux nouveaux plans rappellent le C2E, dont l'évaluation donna un résultat mitigé. Il nous semble plus pertinent de procédé à une réelle évaluation des politiques menées par la précédente législature avant de se lancer dans l'élaboration d'autres plans.

Bien entendu, le gouvernement veut pérenniser les initiatives lancées par la précédente législature et dont l'efficacité a été prouvée. A quelles initiatives fait-on référence ? Ce n'est pas clair. Nous apprenons tout de même que les « premiers emploi jeunes » seront augmentés au sein des administrations. Le nombre de postes ACS ne sera pas augmenté mais les postes existants seront pérennisés. Pourtant, l'accord précise qu'ils seraient accordés en priorité aux personnes peu qualifiées. Nous relevons là une contradiction car à moins de dénoncer les conventions, les postes ACS ne peuvent pas être revus à la baise au niveau de la qualification.

L'ACCOMPAGNEMENT VERS UN EMPLOI EN RÉGION BRUXELLOISE

Dans le cadre de l'amélioration de l'accompagnement des DE, Actiris pourrait bénéficier de personnel supplémentaire. Nous tenons à rappeler que le besoin de personnel se fait aussi cruellement sentir au sein des OISP, surtout dans le contexte d'activation des DE, politique d'activation renforcée par l'accord de gouvernement (nous y reviendrons). Le subventionnement devrait donc suivre également pour les OISP. Cependant, l'accord ne précise rien à cet égard.

Au sujet de l'Ordonnance des Missions Locales, l'accord précise qu'elle sera mise en œuvre de manière à permettre une action complémentaire avec les services d'Actiris et la mise en place d'objectifs quantitatif et qualitatifs ». La FeBISP réaffirme sa volonté de collaboration et rappelle que le premier Arrêté d'exécution a été voté sans aucune concertation, alors que seul un travail commun de tous les acteurs permettra de parvenir à une réelle complémentarité entre eux. De plus, si les Missions Locales doivent prendre en charge de nouvelles missions, il faut que le financement suive. Actuellement, les neuf Missions Locales doivent faire face à un important afflux de DE sans pour autant avoir du personnel supplémentaire.

Compte tenu de leurs résultats, les RAE pourront être renforcés. Nous tenons à relever les dangers de cette politique car les résultats sont déterminés principalement par rapport à la mise à l'emploi. C'est particulièrement difficile pour le public de l'insertion socioprofessionnelle qui est par définition, éloigné du marché du travail. Un RAE peut être, pour du public ISP, une réelle étape vers l'insertion socioprofessionnelle réussie. Cependant les « sorties positives » peuvent prendre des formes variées et du temps. L'intensification de la logique du résultat immédiat rentre en contradiction avec l'essence même du travail en ISP.

Concernant les bureaux sociaux d'interim, l'accord subordonne les nouvelles implantations à une évaluation préalable. Néanmoins, ceux existants seront pérennisés quelle que soit leur évaluation, qui à l'heure actuelle semble être positive.

Bien que la facilitation du rapprochement entre offres et demandes d'emploi est présentée par l'accord comme essentielle, aucune proposition concrète n'est avancée... et ne représente qu'une ligne dans tout l'accord !

Concernant la politique d'activation, elle sera renforcée puisque le Contrat de Projet Professionnel (CPP) sera obligatoire pour les moins de 25 ans. Nous soulevons plusieurs objections à cet épineux sujet. Premièrement, si la signature en est obligatoire, il ne s'agit plus d'un contrat qui présuppose le libre consentement de toutes les parties. Par ailleurs, les OISP n'ont cessé de dénoncer les difficultés pédagogiques auxquelles ils devaient faire face suite à l'activation . En effet, la motivation est fondamentale pour réussir un parcours d'insertion. Les études menées par l'IRES avaient conclu au peu d'effectivité de ces mesures de contrainte, en particulier pour les personnes peu qualifiées.

LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

La généralisation des plans de diversité nous paraît pouvoir déboucher sur de bonnes choses.

Le CV anonyme nous semble être une proposition pleine de bonnes intentions mais fort naïve et peu efficace : la discrimination peut s'opérer sur le lieu de résidence des candidats et lors des interviews. En outre de pouvoir chiffrer la discrimination en élaborant des statistiques, il serait intéressant de proposer encore de nouvelles stratégies pour la combattre.

Enfin, nous devons relever la triste dénomination d'emploi de « dernier ressort » à destination des DE de longue durée, qui malgré plusieurs évaluations positives ne trouvent pas d'emploi. Ce qui est recouvert par ces emplois de derniers ressort reste assez vague...

LA RÉGION ET L'ÉCONOMIE SOCIALE

En matière d'économie sociale, l'accord de gouvernement est précis et combine l'emploi à une autre finalité : emploi et logement dans une perspective de promouvoir les économies d'énergie, emploi et gestion des déchets en vue de favoriser le recyclage ou de valoriser certains déchets au plan énergétique, emploi et mobilité (en termes de sécurité dans les transports en commun), emploi et rénovation et embellissement du bâti en ville.

Cette combinaison d'objectifs nous paraît être porteuse d'opportunités intéressantes, surtout dans la mesure où elle ne se fait pas au détriment de l'existant. Ces plans où des objectifs conjoints sont visés permettront certainement d'insuffler un vent de développement nouveau (voire des moyens supplémentaires) dans le secteur de l'économie sociale d'insertion, qui en a bien besoin.

Nous soutenons l'idée de promouvoir les entreprises d'économie sociale d'insertion actives dans les services aux entreprises, l'amélioration du service, intensification du micro-crédit, le soutien au projet collectif d'insertion, etc. Les EI seront également soutenues dans le secteur des services aux entreprises afin de permettre un regroupement des besoins de main-d'œuvre peu qualifiée non rencontrés. Cela semble une solution prometteuse.

Malheureusement des bémols subsistent : peu de choses sont dites sur la manière de rendre ces projets de développement vraiment opérationnels, et la question des moyens n'est pas abordée. L'accord ne se fixe pas d'objectifs chiffrés. Pas un mot non plus sur ce que compte entreprendre le gouvernement pour exonérer une fois pour toutes le secteur de l'économie sociale de l'accusation de concurrence déloyale moult fois brandie par les représentants des classes moyennes.  

Le développement de l'économie sociale dans les services de proximité n'est pas évoqué. Est-ce en raison du foisonnement actuel des projets titres-services, jugés en nombre suffisant ? Nous tenons à rappeler que les services de proximité ne se limitent pas aux titres-services, et que le double mouvement de vieillissement mais également de rajeunissement de la population bruxelloise aurait mérité un développement de la réflexion sur la combinaison emploi - économie sociale - services aux personnes.

Concernant l'établissement de clauses sociales dans les marchés publics, il est difficile de dire ce qui est exactement visé. Il s'avère que les clauses sociales au sens strict fonctionnent mal. Ce qui intéresse vraiment l'économie sociale, c'est que des marchés lui soient réservés. C'est possible mais il n'y a pas de proposition dans ce sens.

Le texte parle également (c'est une antienne récurrente), de « professionnaliser le secteur ». On pourrait dire à la boutade que pour parvenir à fonctionner en économie sociale, il faut déjà être extrêmement professionnel (et un petit peu fou) : combiner une activité économique et une activité sociale dans un but qui n'est pas le lucre, le tout avec un soutien limité des pouvoirs publics, c'est un tour de force que peu de patrons classiques sont prêts à relever ! A notre sens, professionnaliser pourquoi pas, encore faut-il parvenir à prouver qu'il y ait un besoin à ce niveau. Bien plus, il nous semble urgent de promouvoir toutes les actions qui viseraient à simplifier l'environnement de travail des promoteurs de l'économie sociale, aux niveaux législatif et administratif principalement.

Enfin, le point « Créer des emplois nouveaux dans des secteurs porteurs d'emploi allie l'emploi et les secteurs porteurs et vise l'économie sociale. Il y est précisé que l'Ordonnance du 18 mars 2004 sera évaluée et revue pour la conformer aux directives européennes. A ce sujet, nous vous renvoyons à un article de L'insertion 81 « En route vers la réforme de l'Ordonnance du 18 mars 2004 ».

LA RÉGION ET LA FORMATION

L'augmentation de la prime à la formation professionnelle sera envisagée comme incitant à mieux s'insérer dans les parcours d'insertion. Cette proposition, bien que trop timide, est une avancée.
Les métiers liés aux économies d'énergie constituent sans doute un gisement d'emploi dont le gouvernement veut profiter pleinement grâce à une Alliance Environnement-Emploi qui sera mise sur pied au sein du PCUB et qui accordera une attention particulière à la formation professionnelle. Il y aurait peut-être des pistes pour des formations innovantes. Néanmoins, l'accord n'évoque pas le financement possible pour d'éventuelles nouvelles formations. Sans ce financement, elles ne pourraient se faire qu'au détriment de l'existant.

LA COCOF ET LA FORMATION

L'accord constate l'important taux de chômage des personnes infraqualifiées et fait donc de la formation professionnelle une priorité malgré le sous-financement récurrent de la COCOF.

Concernant la formation professionnelle, l'accord ne semble pas envisager un élargissement des stages tel que demandé dans notre mémorandum. Ce manque est regrettable car le stage offre une première expérience professionnelle indispensable pour le public de l'ISP.

Dans le cadre plus précis de l'ISP, nous rappelons que l'organisation de formations en alphabétisation et en français langue étrangère doit rester une priorité. L'accord ne semble pas y accorder l'attention qu'elles méritent. L'augmentation de l'offre de formation en sfrançais langue étrangère (FLE) est notamment envisagée au sein de la promotion sociale. Nous rappelons que des cours de FLE sont organisés au sein de l'ISP et qu'ils répondent à un besoin criant de nos publics. L'offre en devrait également être augmentée.

Selon l'accord, la formation qualifiante, au sens large, doit être en adéquation avec les besoins des employeurs et de la société. Nous tenons à souligner qu'elle doit également être en adéquation avec le public de l'ISP.

Le rôle de la CCFEE est renforcé en termes de production d'avis, de développement d'expertises, de diffusion d'information et d'appui au membre. Cela nous semble être une proposition intéressante.

Notons enfin, l'indexation de la prime stage qui passerait de 1 euro de l'heure à 1,5 euros de l'heure. Nous nous réjouissons de cette annonce qui répond à une demande récurrente de la FeBISP, reprise au sein de son mémorandum. Nous espérons que le financement suivra.

Un autre point positif : l'engagement du Collège à déployer des actions ISP car le dispositif a atteint sa limite en termes de capacité d'accueil. De plus, « ce déploiement se fera en préservant les spécificités méthodologiques et pédagogiques propres à l'ISP, y compris son volet éducation permanente ». Cette position est en accord avec les demandes faites dans notre mémorandum.

De plus, le développement d'une offre de formation qui débouchent sur des emplois en privilégiant les secteurs d'avenir ou les fonctions en pénurie, nous semble être un axe intéressant. Néanmoins, il ne doit pas se faire au détriment de formation pour des secteurs qui ont déjà prouvé leur efficacité en termes d'emploi.

Au vue des priorités de l'accord, nous nous interrogeons sur la question des moyens supplémentaires qui n'y est pas abordée concrètement.

LA COCOF ET LES EMPLOYEURS DU NON-MARCHAND

Pour l'année 2009, le budget initialement prévu sera respecté. Pour notre secteur, cela garantit le financement 2009 selon la ligne budgétaire prévue.

L'accord garanti uniquement le minimum au sujet du soutien aux travailleurs, c'est-à-dire la garantie de l'indexation et de l'évolution des barèmes. Le Collège tentera également de combler le différentiel entre les subventions ACS et les barèmes des différentes commissions paritaires, c'est également une demande faite dans notre mémorandum. Cependant, concernant les mesures de fin de carrière, nous restons doublement vigilants : d'une part, sur la prépension et d'autre part, sur l'extension du plan tandem auquel, pour rappel, le secteur de l'ISP est opposé car il semble difficilement applicable sur le terrain.

Concernant les mesures de bonnes gouvernances, nous soutenons les démarches d'évaluation qualitative à condition que les critères soient pertinents et adéquats quant au travail que nous fournissons. La prise en compte des travaux des diverses instances consultatives nous semble être un bon signal comme le principe d'opposabilité appliqué à la Charte associative.

Enfin, nous restons particulièrement vigilant à la défense du non marchand comme « services d'intérêt général » car c'est une demande cruciale pour la pérennité de notre secteur.

Notons également la volonté de simplification administrative qui est également une demande récurrente du secteur et que nous avions portée au sein de notre mémorandum. Toutefois, l'accord semble réserver les collaborations croisées uniquement au secteur social santé et nous souhaitons qu'elles concernent aussi nos secteurs.

LES ACCORDS EN GÉNÉRAL

Les accords placent l'emploi et la formation parmi leurs priorités, ce qui nous semble très positif. Nous espérons que par ces temps de grande disette, le financement sera à la hauteur des défis lancés par la crise actuelle.

NOTE DE BAS DE PAGE

1. L'insertion 77, Sur le vif, L'ISP dénonce les dérives de l'activation des demandeurs d'emploi, Tatiana Vanessa Vial Grosser

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